Pignal, M., C. Laudereau & P.-L. Laudereau (2023). Revision of the genus Porpax (Orchidaceae, Podochileae) in New Caledonia. Candollea 78: 17–26. In French, English and French abstracts.
A taxonomic revision of the genus Porpax Lindl. (Orchidaceae, Podochileae) in New Caledonia is presented. Four species are recognised, three of which are newly described. The new species are vegetatively similar to P. karikouyensis (Schltr.) Schuit. et al. but differ in flower colour, size and shape. Porpax angelinae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud. has burgundy red flowers, horizontally oriented petals, and a very short inflorescence; P. ceciliae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud. has yellow, semi-open flowers, and a tubercled labellum below; P. lydwineae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud. bears larger, rounded, bright red tepals. The conservation status according to IUCN criteria shows that three out of the four species are threatened. A dichotomous key to Porpax for New Caledonia is provided. A lectotype for the name Eria karikouyensis Schltr. is also designated.
Submitted on August 28, 2022. Accepted on January 19, 2023. First published online on March 28, 2023.
Pignal, M., C. Laudereau & P.-L. Laudereau (2023). Révision du genre Porpax (Orchidaceae, Podochileae) en Nouvelle-Calédonie. Candollea 78: 17–26. En français, résumés anglais et français.
Une révision taxonomique du genre Porpax Lindl. (Orchidaceae, Podochileae) en Nouvelle-Calédonie est présentée. Quatre espèces sont reconnues dont trois nouvellement décrites. Les nouvelles espèces sont végétativement similaires à P. karikouyensis (Schltr.) Schuit. et al. mais diffèrent par la couleur, la taille et la forme des fleurs. Porpax angelinae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud. a des fleurs rouge bordeaux, des pétales orientés horizontalement et une inflorescence très courte; P. ceciliae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud. a des fleurs jaunes, semi-ouvertes et un labelle tuberculé en dessous; P. lydwineae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud. possède des tépales plus grands, arrondis et rouge vif. Le statut de conservation selon les critères de l'UICN montre que trois espèces sur quatre sont menacées. Une clé d'identification du genre Porpax pour la Nouvelle-Calédonie est proposée. Un lectotype pour le nom Eria karikouyensis Schltr. est aussi désigné.
Introduction
La Nouvelle-Calédonie possède un micro-endémisme élevé qui est aujourd'hui particulièrement menacé (Morat et al., 1999; Wulff, 2012) et fait partie des hotspots définis par Myers (1988). L'étude de sa flore est loin d'être terminée puisque le rythme de description moyen actuel est d'une espèce nouvelle par mois (Gâteblé et al., 2018). Ce constat date de plusieurs années, mais il est encore d'actualité et dans le cadre du projet ERMines [Espèces Rares et Menacées des massifs miniers de Nouvelle-Calédonie], Lannuzel et al. (2022) ont observé de nombreuses espèces de plusieurs massifs miniers potentiellement nouvelles et menacées. Dans le cadre de la révision des Orchidaceae pour l'archipel débutée il y a quatre ans, quatre nouvelles espèces endémiques ont déjà été décrites dans les genres Dendrobium Sw. (Pignal & Munzinger, 2020; Pignal et al., 2020) et Pterostylis R. Br. (Pignal et al., 2021a). Ces recherches ont aussi permis la découverte de deux taxons pour la Grande Terre et les îles Loyauté: Bulbophyllum savaiense Schltr. et Dendrobium vagans Schltr. (Pignal et al., 2021b, 2022b), ainsi que la redécouverte de D. petrophilum (Kraenzl.) Garay ex N. Hallé permettant de clarifier sa taxonomie (Pignal et al., 2022a).
La circonscription taxonomique du genre Porpax Lindl. a été récemment redéfinie (Ng et al., 2018). Ce genre regroupe aujourd'hui des espèces anciennement placées dans les genres Stolzia Schltr. (13 spp.), Eria sect. Conchidium (Griff.) Lindl. (14 spp.), Dendrobium (5 spp.), Bulbophyllum (3 spp.) et Polystachya (1 sp.). Le genre Porpax comporte à présent environ 56 espèces épiphytes ou lithophytes et possède une large répartition géographique de l'Afrique tropicale, l'Asie tropicale et subtropicale jusqu'au sud-ouest du Pacifique.
En Nouvelle-Calédonie, Hallé (1977) reconnaît trois espèces de Eria Lindl. dans son traitement pour la flore de Nouvelle-Calédonie. Il avait déjà reconnu que l'espèce E. karikouyensis Schltr., seule espèce de la section Conchidium en Nouvelle-Calédonie, ne comportait pas de «poils longs insérés aux sutures» entre les graines dans sa cavité carpellaire en suggérant que ce taxon soit exclu du genre. Avant cette révision, la seule espèce reconnue du territoire dans le genre Porpax est: P. karikouyensis (Schltr.) Schuit. et al. L'exploration plus attentive des massifs forestiers, ainsi que l'étude des collections d'herbier nous permet de réviser ce genre en Nouvelle-Calédonie. Il compte quatre espèces endémiques dont trois nouvellement décrites ici: P. angelinae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud., P. ceciliae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud. et P. lydwineae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud.
Une étude de l'appareil végétatif des espèces du genre Porpax en Nouvelle-Calédonie complète cette révision.
Matériel et méthodes
Les collections conservées dans les herbiers de LY, NOU et P ont été étudiées, les scans sont consultables sur le site RECOLNAT [ https://www.recolnat.org]. Des missions de terrain ont aussi permis d'étudier les plantes vivantes, éléments indispensables à toute révision taxonomique comme montré par Faria (2016) pour le genre Corybas Salisb. Les nombreuses photographies de terrain réalisées par CL sont aussi consultables sur le site internet de l'association Endemia.nc [ https://endemia.nc].
Les mesures données dans les descriptions et les tables ont été effectuées sur les spécimens des herbiers de NOU et P, ainsi que sur les images disponibles en utilisant l'outil Annotate-on (version 1.9.56) proposé par l'infrastructure RECOLNAT [ https://www.recolnat.org/fr/annotate]. Dans les descriptions, la taille des organes ayant fait l'objet de nombreuses mesures est exprimée selon la convention: (minimum-) premier quartile-troisième quartile (-maximum).
Le risque d'extinction des espèces exposées dans ce travail a été localement évalué par la «Redlist Authority» de Nouvelle-Calédonie en novembre 2022 [NC-RLA] suivant les critères de l'UICN France (2018). Ces recommandations pourront faire l'objet de modifications lors de la validation au niveau international.
Clef d'identification du genre Porpax en Nouvelle-Calédonie
1. Sépale dorsal > 5,7 mm de long; pièces du périanthe à apex formant un angle arrondi; fleurs rouge sombre P. lydwineae
1a. Sépale dorsal < 5 mm de long; pièces du périanthe à apex aigu; fleurs rouges, oranges ou jaunes 2
2. Fleurs toujours entrouvertes, jaune pâle, rarement orangé pâle; labelle à deux arêtes de papilles face inférieure; pétales c. 3,3 mm de long; plantes terrestres de bords de rivières (creeks) P. ceciliae
2a. Fleurs en général bien ouvertes, rouges ou orangées; labelle non tuberculé face inférieure; pétales > 3,3 mm long (parfois plus courtes chez P. karikouyensis); plantes épiphytes ou lithophytes dans la mousse 3
3. Inflorescence 3 mm de long; sépale dorsal concave; pétales orientés horizontalement, apex aigu c. 60°; fleur rouge sombre; ovaire formant un angle avec l'axe de l'inflorescence P. angelinae
3a. Inflorescence c. 10 mm de long; sépale dorsal convexe; pétales orientés diagonalement vers le haut, apex à angle étroit c. 26°; fleur orangée, parfois sombre; ovaire parallèle à l'axe de l'inflorescence P. karikouyensis
Key to the genus Porpax in New Caledonia
1. Dorsal sepal > 5.7 mm long; perianth pieces with apex forming a rounded angle; flowers dark red P. lydwineae
1a. Dorsal sepal c. 5 mm long; perianth pieces with acute apex; red, orange or yellow flowers 2
2. Flowers always half-open, light yellow, rarely light orange; labellum with two ridges of papillate hairs on lower side; petals c. 3.3 mm long; terrestrial plants of riversides P. ceciliae
2a. Flowers generally well opened, red or orange; labellum without two ridges of papillae on lower side; petals > 3 mm long (sometimes shorter in P. karikouyensis); epiphytic or lithophytic plants in moss 3
3. Inflorescence 3 mm long; dorsal sepal concave; petals horizontally oriented, apex acute angled c. 60°; flower dark red; ovary forming an angle with axis of inflorescence P. angelinae
3a. Inflorescence c. 10 mm long; dorsal sepal convex; petals diagonally oriented upwards, apex narrowly acute angled c. 26°; flower orange, sometimes dark; ovary parallel to axis of inflorescence P. karikouyensis
Taxonomie
Porpax angelinae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud., sp. nov.
(Fig. 1A, 2A).
Holotypus: Nouvelle-Calédonie. Prov. Sud: Mont Do, 21°45′12″S 166°00′01″E, 950–1020 m, 25.III.2017, fl., fr., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 392 (NOU [NOU092584]!, iso-: P [P04186531]!).
Porpaci karikouyensi (Schltr.) Schuit. et al. similis, sed inflorescentiis subsessilibus (vs. elongatas), floribus vinosis (vs. aurantiacos), sepalis dorsalibus petalisque ovatis lanceolatis (vs triangularia), sepalis lateralibus concavis (vs. convexa), petalis horizontalibus (vs. diagonales), ovarioque ad angulum ca. 90° axe inflorescentiae (vs. parallelum), praecipue differt.
Plante épiphyte ou lithophyte dans la mousse. Racines charnues, pubescentes, 0,4 – 0,5 mm de diam.; pseudobulbes unifoliés ovés aplatis, verts, appliqués au substrat, c. 3 × 4 mm, recouverts de 1–2 bractées engainantes et marcescentes, les nervures principales formant un réseau blanchâtre. Feuilles sessiles ou très courtement pétiolées; limbe sub-orbiculaire, (7,2–)7,7–8,9(–9,3) × (4,7–)6,7–7(–7,8) mm, très coriace, à extrémité arrondie ou très obscurément émarginée, vert sombre, nervure centrale en sillon, appliquées au substrat. Inflorescences uniflores, très courtes (pédicelle réduit, 3 × 1 mm); bractée d'inflorescence engainante papyracée c. 2,5 mm. Fleurs rouge bordeaux d'aspect coriace, en général largement ouvertes; sépale dorsal ové, 4 × 2,4 mm, concave, à apex aigu, formant un angle c. 73°; sépales latéraux triangulaires, asymétriques, 4–5 × 4 mm à extrémités aigües (angle c. 58°) et recourbées, soudés sur leur moitié inférieure et soudés juste à la base avec le sépale dorsal. Pétales étroitement ovés, 3,5–3,8 × 1,1–1,6 mm, apex aigu formant un angle c. 60°, orientés horizontalement; labelle ové, 1,8 × 2,8 mm si étalé, à bords relevés et formant un large sillon central longitudinal, à apex aigu crénelé, face inférieure et bordure à cellules arrondies un peu saillantes; colonne 1,4–3,3 × 0,85–1,13 mm, rouge; rostellum blanc, large, recourbé vers le bas, 0,5 mm de long; cavité stigmatique large, ob-ovée; mentum recourbé, 2 × 0,5 mm, plus sombre que la colonne; connectif à sommet rouge brunâtre et à base orangée, 0,6 × 0,5 mm; pollinies 8, ob-ovoïdes aplaties, par paires, 0,46 × 0,19 × 0,1 mm; ovaire 3 × 0,7 mm, orangé sale, recourbé, formant un angle avec l'axe de l'inflorescence. Capsule ob-ovoïde, dressée, verte, 8–10 × 2–4 mm.
Étymologie. – Ce nouveau taxon est dédié à Angéline Laudereau, seconde fille de Christian et Lydwine Laudereau, sœur de Pierre-Louis Laudereau, et qui accompagne ses parents dans les travaux d'inventaires.
Distribution, écologie et phénologie. – Porpax angelinae est épiphyte et se développe dans la mousse. Sa répartition est localisée au centre du territoire: au Mont Do, à plus de 1000 m d'altitude et sur les flancs Est du Mont Pénari [Poenari], près de la commune de Thio, à 850 m (Fig. 3).
Cette espèce fleurit et fructifie sans doute tout au long de l'année avec une lacune en mai selon les observations régulières réalisées par CL entre 2015 et 2022.
Statut de conservation. – Porpax angelinae n'est connu avec certitude que dans deux stations au Mont Do et sur le versant Est du Mont Penari à Thio à moyenne altitude. Ces localités sont pauvres en individus. Les principales menaces qui pèsent sur P. angelinae sont les feux de brousse, l'exploitation minière (à quelques kilomètres de l'une des stations) et une sécheresse persistante inhabituelle. Porpax angelinae est provisoirement évalué comme «En danger» [EN B1ab(iii,v)+2ab(iii,v)] par la NC-RLA en lien avec sa distribution restreinte et les menaces potentielles de feux et de sécheresse.
Notes. – Ce nouveau taxon se reconnaît par son inflorescence presque sessile dont la fleur est toujours inclinée vers le bas (l'ovaire forme un angle droit avec l'axe de l'inflorescence), les pièces du périanthe sont rouge bordeaux, le sépale dorsal concave et les pétales orientés horizontalement.
Clements et al. (1992: 47) ont représenté un spécimen, dessiné par Lucy Turner, que nous rapportons à cette nouvelle espèce.
Dans le Sud, à Wé Toa (Haute Kuébeni [Kubini ou Kwé binyi]) à 450 m (C. Laudereau & L. Laudereau 1273, NOU [NOU092423]) et à la mine Emma (Mont Mé Maoya) à 800 m (Jaffré 3214, NOU [NOU003780], P [P00482506]), des spécimens sont peut-être à rapporter à ce nouveau taxon, mais ils présentent des différences morphologiques, comme la longueur du pédicelle, ainsi que l'orientation convexe et la forme du sépale dorsal. Une étude complémentaire est nécessaire pour placer ces individus.
Spécimens examinés. – Nouvelle-Calédonie. Prov. Sud: Mont Do, 21°45′12″S 166°00′01″E, 950–1020 m, 27.VIII.2017, fl., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 549 (NOU [NOU092586], P [P04186532]); ibid. loco, 3.I.2018, fl., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 654 (NOU [NOU092585], P [P04186530]); pente W du Mont Do, 800 m, [21°45′57″S 165°59′54″E], 23.III.1977, MacKee 32947 (P [P00146726]).
Porpax ceciliae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud., sp. nov.
(Fig. 1B, 2B, C).
Holotypus: Nouvelle-Calédonie. Prov. Nord: massif du [Petit] Boulinda, 21°18′03″S 165°05′34″E, 520–530 m, 1.VI.2019, fl., C. Laudereau & L. Laudereau 1270 (NOU [NOU092424]!; iso-: NOU [NOU092411 spirit]!, P [P00778907]!).
Planta ripicola Porpaci karikouyensi (Schltr.) Schuit. et al. similis, sed floribus minoribus (5,3 × 4,8 vs. 8 × 8 mm) luteis (vs. aurantiacos), paulo apertis (vs. manifeste), sepalis dorsalibus petalisque ovatis (vs. triangularia), praecipue differt.
Plante terrestre, le long des creeks sur cuirasse latéritique et péridotites. Racines charnues, pubescentes; pseudobulbes unifoliés, ovés aplatis, verts, appliqués au substrat, c. 4 × 3 mm, recouverts par 1–2 bractées engainantes et marcescentes. Feuilles sessiles à limbe largement elliptique, (4,4–)5,3–6,5(–8,6) × (3–)3,9–4,3(–5,8) mm, très coriace, à extrémité arrondie ou aigüe, vert sombre, nervure centrale en sillon, appliquées au substrat. Inflorescence uniflore, rarement biflore, 8–10 × 0,3 mm (fleur comprise); bractée d'inflorescence étroitement cordiforme, peu engainante, c. 3 × 2 mm. Fleurs jaune pâle, rarement orange pâle, en général peu ouverte; sépale dorsal ové lancéolé, 3,9 × 1,9 mm, convexe, à apex aigu-arrondi, formant un angle c. 60°; sépales latéraux triangulaires, asymétriques, 2,9–3,5 × 1,9–2 mm à extrémités aigües (angle c. 79°) et un peu recourbées, soudés ensemble sur leurs ½ à ¾ inférieures et soudés juste à la base avec le sépale dorsal. Pétales ovés-oblongs, 3,3 × 1,4 mm, apex aigu formant un angle c. 60°, orientés horizontalement; labelle étroitement ové, 2,6 × 1,8 mm si étalé, jaune, à extrémité dentée, à bords relevés et formant un étroit sillon central longitudinal, à apex aigu, la face inférieure porte 2 crêtes saillantes de papilles (voir Fig. 1B lfv et lfd); colonne jaune, 1 × 0,5 mm; rostellum blanc, large; mentum jaune, recourbé; connectif à sommet vert et à base jaune, 0,43 × 0,45 mm; pollinies 8, ob-ovoïdes aplaties, par paires, 0,34 × 0,14 × 0,1 mm; ovaire, 3 × 0,5 mm, jaune, recourbé. Capsules ovoïdes.
Étymologie. – Ce nouveau taxon est dédié à Cécilia Laudereau, fille aînée de Christian et Lydwine Laudereau, sœur de Pierre-Louis Laudereau, et également passionnée de sorties naturalistes.
Distribution, écologie et phénologie. – Porpax ceciliae est localisée dans les sites suivants: en province Sud, le Mont Dzumac (près du réservoir d'eau), la source de la Ouinné, le col de Mouirange (les Dalmates), le parc Provincial de la rivière Bleue (la rivière Blanche) et la rivière des lacs (la Madeleine). En province Nord, P. ceciliae a été récolté sur le massif du [Petit] Boulinda à Poya, ainsi qu'à Poro, sur cuirasse démantelée, principalement sur roches ferrugineuses (chromes de fer) (Fig. 3). Contrairement aux autres Porpax de Nouvelle-Calédonie qui sont principalement épiphytes (sur les troncs ou les grosses branches) ou saxicoles, ce taxon croît davantage à l'humidité: il se trouve toujours le long de rivières [creeks] qui coulent en permanence, sur roches (dunites et chromes de fer) et sur sols latéritiques. L'espèce peut être parfois immergée pendant la saison des pluies.
Cette espèce fleurit de février à octobre et fructifie tout au long de l'année selon les observations réalisées par CL entre 2014 et 2022.
Statut de conservation. – Porpax ceciliae est connue de six stations dans le sud, au centre et dans le nord de la Grande-Terre à basse altitude (0–500 m). Les principales menaces qui pèsent sur cette espèce sont l'exploitation minière et la sécheresse persistante. Dans des situations climatiques opposées, l'érosion des bords de creeks lors de certaines inondations peuvent la faire disparaître des stations. Pour ces raisons, la nouvelle espèce est provisoirement évaluée par la NC-RLA comme «Vulnérable» [VU B1ab(ii,iii,v)+2ab(ii,iii,v)].
Notes. – Ce nouveau taxon ripicole possède des fleurs plus petites que les autres espèces de Nouvelle-Calédonie, elles sont en général jaunes (parfois jaune foncé) et sont entrouvertes à l'anthèse, les sépales et les pétales sont plutôt ovés, alors qu'ils sont étroitement triangulaires chez P. karikouyensis.
Spécimens examinés. – Nouvelle-Calédonie. Prov. Sud: Dalmates, 22°12′24″S 166°40′13″E, 180–190 m, 26.III.2017, fl., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 399 (NOU [NOU092580], P [P04186534]); mont Dzumac près du réservoir, 22°06′40″S 166°27′16″E, 430–440 m, 7.X.2017, fl., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 577 (NOU [NOU092579]); baie Ué, [22°18′50″S 166°46′53″E], 240–260 m, 15.X.2017, old fl., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 584 (NOU [NOU092577]; mont Dzumac près du réservoir, 22°06′40″S 166°27′16″E, 430–440 m, 17.III.2019, C. Laudereau 1260 (NOU [NOU092578]); Haute Kuébeni, 22°15'12«S 166°57‘47«E, 200–210 m, 30.VI.2019, fl., C. Laudereau 1277 (NOU [NOU092412], P [P00778918]).
Porpax karikouyensis (Schltr.) Schuit., Y.P. Ng & H.A. Pedersen, Bot. J. Linn. Soc. 186: 200. 2018
(Fig. 1C, 2D).
≡ Eria karikouyensis Schltr., Bot. Jahrb. Syst. 39: 76. 1906.
Lectotypus (hic designatus): Nouvelle-Calédonie. Prov. Sud: «Auf den Bergen bei Paita», 500 m, 7.X.1902, Schlechter 14963 (P [P00121292]!; isolecto-: BR [BR0000006574567] image!, E [E00383604] image!, G [G00165697, G00165698] images!, K [K000827421] image!, LE [LE00011204] image!, LY [LY0562827]!, M [M0226937] image!, NSW [NSW830744] image!),P [P00121292] image!. Syntypi: Nouvelle-Calédonie.Prov.Sud: «Auf den Bergen bei Paita»,500 m, 9.X.1902, Schlechter 14963 (AMES [AMES00099269] image!,BR [BR0000006574895] image!,P [P00121293]!); ibid.loco,11.X.1902,Schlechter14963(BM [BM000990516] image!); «Auf den Bergen am Ngoye», 900 m, 6.XI.1902, Schlechter 15238 (P [P00121294]!).
Plante corticole, épiphyte ou lithophyte prostrée. Racines 0,6 mm de diam., cachées par les pseudobulbes; pseudobulbes unifoliés, largement ellipsoïdes, verts, appliqués au substrat, 2,6–5 × 1,6–2,2 mm, formant un rhizome flexueux, les plus anciens défeuillés, recouverts par 1–2 bractées engainantes et marcescentes, les nervures principales formant un réseau blanchâtre. Feuilles sessiles terminant chaque pseudobulbe, appliquées au substrat et placées en position alterne le long de la tige, limbe sub-orbiculaire, (6,1–)6,3–8(–9,2) × (3,9–)4,3–4,7 (–5,4) mm, très coriace, à extrémité arrondie très obscurément émarginée ou formant un angle 89°, vert sombre, à nervure centrale en sillon, à grosses cellules sphériques, à 5–7 nervures visibles chez les plantes en alcool ou certains spécimens secs. Inflorescences terminale uniflore, 10 mm de long (fleur comprise) sur des pseudobulbes feuillés; pédicelle 5 × 0,5 mm; bractée d'inflorescence triangulaire, papyracée, 1,6 × 1 mm. Fleurs orange plus ou moins soutenu, en général largement ouvertes, 7–8 × 6–8 mm; pédoncule très court; bractée florale linéaire, 1,4 mm de long; sépale dorsal triangulaire, étroit, 5 × 2 mm, convexe, trinervé, apex aigu, angle c. 29°–35°; sépales latéraux triangulaires asymétriques, 3,4–3,8 × 1,9–2,5 mm, trinervés, base en forme de cuvette, extrémités atténuées (angle 50°) et recourbées, soudés sur leur moitié inférieure et soudés juste à la base avec le sépale dorsal. Pétales triangulaires à extrémité atténuée (angle 26°–30°), 3–3,6 × 1 mm, orientés diagonalement; labelle ové, 2,3–2,9 × 1–1,2 mm (si étalé), à gouttière centrale, à petites cellules arrondies face inférieure, à bords relevés 0,5–0,7 mm de haut, bordure un peu crénelée, extrémité aigüe à apiculée (angle 48°), attaché au mentum par une languette très étroite; colonne 1 × 0,58 mm, orange, tronquée; rostellum blanc, large, recourbé vers le bas; cavité stigmatique large, ob-ovée; mentum recourbé, à face plane, orange plus soutenu, 2 × 0,6 mm, formant un angle droit avec la colonne; connectif à sommet sombre et base blanche à verdâtre, 0,4 × 0,4 mm; pollinies 8, ob-ovoïdes aplaties, par paires, 0,34 × 0,17 × 0,06 mm; ovaire 2,6 × 0,6 mm, parallèle à l'axe de l'inflorescence, pubescent. Capsules ob-ovoïdes vertes, 3–6 × 2 mm, dressées; pédoncule, 2–6 × 0,6–2,2 mm, restes du périanthe marcescents.
Étymologie. – L'épithète se réfère à la localité type aux abords de la rivière de la Karikouié (Mont Mou).
Distribution, écologie et phénologie. – Porpax karikouyensis est distribuée sur toute la Grande Terre et notamment dans les forêts humides et les maquis miniers (Fig. 3). On la trouve sur des troncs d'arbres jusqu'à plus de 2 m de hauteur (Fig. 2D).
Elle fleurit et fructifie tout au long de l'année.
Statut de conservation. – Compte tenu de sa très large répartition en Nouvelle-Calédonie, Porpax karikouyensis a été considérée par la NC-RLA comme en “Préoccupation mineure” [LC].
Notes. – Schlechter (1906: 76) a décrit Eria karikouyensis en se basant sur deux syntypes (Schlechter 14963 et 15238). De plus Schlechter 14963 a été récolté à trois dates différentes (7, 9 et 11 octobre 1902). Tout le matériel original a été détruit à Berlin durant la Seconde Guerre mondiale. Schlechter 14963 collecté le 7.X.1902 déposé à P est désigné ici comme le lectotype avec de nombreux isolectotypes.
Spécimens examinés et sélectionnés. – Nouvelle-Calédonie. Prov. Nord: roches de la Ouaième, 20°38′23″S 164°51′48″E, 780–800 m, 10.VIII.2017, fl., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 522 (NOU [NOU092574]); mont Paéoua, 21°10′37″S 165°05′13″E, 1060–1080 m, 26.XI.2017, fl., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 623 (NOU [NOU092572]); mont Kaala, 20°36′53″S 164°23′13″E, 880–900 m, 20.VII.2018, fl., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 717 (NOU [NOU092570]); ch. de GR Amoa vers Pombei, 20°55′56″S 165°10′46″E, 710–720 m, 12.X.2019, fl., C. Laudereau & L. Laudereau 1310 (NOU [NOU092418], P [P02275925]); Poindimié, massif du Tchingou, 1000 m, [20°54′S 164°59′E], 13.XII.1983, Morat 7635 (NOU [NOU003799]). Prov. Sud: Mont-Dore, Thy, 600 m, [22°10′S 166°31′E], 9.X.1980, fl., Brinon 859 (NOU [NOU003777]); mont Dzumac, c. 630 m, [22°05′S 166°26′E], 8.XII.1988, fr., Hoogland & Jérémie 12868 (P [P00162960, P00162961]); pic du Pin, 22°14′48″S 166°49′35″E, 300–320 m, 26.III.2017, fl., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 395 (NOU [NOU092575]); mont Do, 21°45′12″S 166°00′01″E, 1010–1020 m, 27.VIII.2017, fl., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 548 (NOU [NOU092576]); crête au S Baie Ouinné, 400–500 m, [21°59′51″S 166°40′15″E], 5.VIII.1973, fl., MacKee 27176 (NOU [NOU003775], P [P00146729]); montagne des Sources reserve, c. 20 air-km NE of Nouméa, 800 m, [22°10′S 166°36′E], 2.III.1980, fl., McPherson 2497 (MO [MO-3065079], NOU [NOU003774], P [P00146738]). Sine loco: s.d., Anon. s.n. (P [P02060007]); forêt, 800 m, 1961, fl., Denizot s.n. (P [P00146751]); bords des cours d'eau, fl., s.d., Vieillard 1363 (P [P00146742]).
Porpax lydwineae M. Pignal, Laud. & P.-L. Laud., sp. nov.
(Fig. 1D).
Holotypus: Nouvelle-Calédonie. Prov. Nord: proche du ch. du GR Nord sur le Goro Até Mèkébo, 21°02′00″S 165°10′00″E, 620–630 m, 12.X.2019, fl., C. Laudereau & L. Laudereau 1309 (NOU [NOU092419]!; iso-: P[P00778921]!).
Porpaci karikouyensi (Schltr.) Schuit. et al. similis, sed floribusmajoribus (9,3 × 9,7 vs. 5 × 4 mm), aurantiaco-vinosis (vs. aurantiacos), apice sepalorum rontundato (vs acutum), petalis latioribus (2,4 vs. 1,2 mm) ovatisque (vs. triangularia), praecipue differt.
Plante épiphyte ou lithophyte dans la mousse. Racines charnues, pubescentes, 0,4–0,5 mm de diam.; pseudobulbes unifoliés ovés aplatis, verts, appliqués au substrat, c. 4 × 3 mm, protégés par 1–2 bractées engainantes et marcescentes, les nervures principales formant un réseau blanchâtre. Feuilles sessiles ou très courtement pétiolées, appliquées au substrat, à limbe sub-orbiculaire, c. 4 × 3,5 mm, très coriaces, à extrémité arrondie très obscurément émarginée, vert sombre, nervure centrale en sillon. Inflorescences terminale uniflore, 10 mm de long (fleur comprise); pédicelle 3,8 × 0,5 mm, pubescent; bractée d'inflorescence triangulaire, engainante, papyracée, 2,4 × c. 2 mm. Fleurs rouge sombre d'aspect coriace, en général largement ouvertes, 9,3 × 9,7 mm; pédoncule très court; bractée florale linéaire c. 1 × 0,3 mm; sépale dorsal ové, 5,7–6 × 3,8 mm, convexe, à apex arrondi, formant un angle c. 87°; sépales latéraux réniformes, asymétriques, 6,7 × 4–4,1 mm à extrémités arrondies (angle c. 100°) et recourbées, soudés sur leurs moitiés inférieures et soudés juste à la base avec le sépale dorsal. Pétales ovés, coriaces, 4,4–5,2 × 2,3–2,5 mm, à extrémité formant un angle arrondi de c. 87°, orientés diagonalement; labelle ové, 4,6 × 1,4 mm, à bords relevés et formant un large sillon central longitudinal, à apex arrondi ou émarginé crénelé, face inférieure et bordure à cellules arrondies un peu saillantes; colonne rouge, 0,8 × 0,4 mm; rostellum rouge orangé, large; mentum rouge sombre, arqué, 5 × 0,6 mm; connectif à sommet rouge sombre et à base blanche à verdâtre, 0,6 × 0,6 mm; pollinies 8, ob-ovoïdes aplaties, par paires, 0,29–0,41 × 0,13–0,17 × 0,08 mm; ovaire 3 × 0,7 mm, vert ou orange sale et pubescent. Capsule non vue.
Étymologie. – Ce nouveau taxon est dédié à Lydwine, épouse de Christian Laudereau et mère de Pierre-Louis Laudereau. Elle participe quotidiennement avec son mari aux travaux d'inventaires dans toute la Nouvelle-Calédonie.
Distribution et écologie et phénologie. – Porpax lydwineae n'a été observée qu'à proximité de la vallée d'Amoa sur le versant rive gauche, sous le Goro Até Mèkébo entre 620 et 630 m (Fig. 3). Elle pousse en épiphyte dans des milieux moussus et humides de crête sur volcano-sédimentaire.
Cette espèce fleurit d'août à octobre selon les observations réalisées par CL entre 2017 et 2022. Elle reste pour le moment inconnue en fruit.
Statut de conservation. – Porpax lydwineae a été observée dans une seule localité à Amoa. Les principales menaces qui pèsent sur cette nouvelle espèce sont les feux de brousse, fréquents dans la région, ce qui a poussé la NC-RLA à évaluer provisoirement P. lydwineae comme «En danger critique» [CR B1ab(iii,v)+2ab(iii,v)].
Notes. – Porpax lydwineae est caractérisée par des fleurs plus grandes que les autres espèces Porpax de Nouvelle-Calédonie, elles sont rouges (et non oranges comme chez P. karikouyensis) avec des sépales et des pétales arrondis apicalement.
Spécimens examinés. – Nouvelle-Calédonie. Prov. Nord: proche du ch. du GR Nord sur le Goro Até Mèkébo, 21°02′00″S 165°10′00″E, 620–630 m, 7.VIII.2017, fl., C. Laudereau & P.-L. Laudereau 506 (NOU [NOU092587], P[P04186533]).
Appareil végétatif des espèces du genre Porpax en Nouvelle-Calédonie
Hallé (1977) a utilisé l'architecture végétative des Orchidaceae dans plusieurs clefs d'identification au niveau générique. Andersen et al. (1988) a étudié le genre Eria s.l. et a défini huit modèles d'architecture sur la base d'observations anatomiques («habits a to j»). Parmi ces modèles, deux se retrouvent dans le genre Porpax comme actuellement défini: «habit f» pour P. lacei (Summerh.) Schuit. et al. (≡ Eria lacei Summerh.) et «habit i» pour Porpax parviflora (D. Don) Ormerod & Kurzweil (= Eria muscicola (Lindl.) Lindl.) et Porpax pusilla (Griff.) Schuit. et al. (≡ Eria pusilla (Griff.) Lindl.).
L'appareil végétatif de tous les Porpax de Nouvelle-Calédonie est homogène.
Il se caractérise par une croissance sympodiale et la présence de modules végétatifs à croissance définie, la reprise se faisant grâce à un bourgeon basal.
Chaque module est issu du développement d'un bourgeon basal ou sub-terminal. Certains entrenœuds sont épaissis et charnus et constituent des pseudobulbes, ces derniers peuvent être composés d'un ou plusieurs entrenœuds. Cette architecture végétative correspond au «habit i» de Andersen et al. (1988) (Fig. 2, 4A).
Cette croissance sympodiale donne ainsi un aspect flexueux au rhizome, les feuilles paraissent alternes et distiques le long d'un pseudo-rhizome. La partie érigée décrite par Andersen et al. (1988) est nulle et ne subsiste que par un méristème sub-apical qui permet la reprise de la végétation. Les réseaux de pseudobulbes forment parfois un tapis extrêmement dense.
Un autre modèle a été observé dans Porpax bulbophylloides (C. Schweinf.) Schuit. et al. endémique de l'archipel des Fidji (Fig. 4B). Les pseudobulbes de cette espèce sont érigés et bien formés et n'appartiennent pas au rhizome fin qui les sépare. Ce dernier formant la partie basale du module de végétation et l'inflorescence, sa partie distale (Schweinfurth, 1936; Kores, 1989). Cette architecture correspond à l'«habit h» de Andersen et al. (1988).
Les espèces néocalédoniennes présentent aussi beaucoup d'analogies avec plusieurs taxons de Thaïlande, d'Indochine, de Malaisie et de Singapour (comme par exemple Porpax thaithongiae Suddee). Chez toutes ces espèces, l'organisation de l'appareil végétatif est la même que chez les espèces de Nouvelle-Calédonie, mais les pseudobulbes sont bifoliés (au contraire des espèces néocalédoniennes qui sont unifoliées), ce qui suppose la présence de deux nœuds. Ils se présentent en structures plus ou moins aplaties, les bractées qui les entourent sont également marcescentes et elles forment une tunique qui peut prendre des aspects divers: entière ou former un réseau de fibres en filets. L'inflorescence est sessile et la fleur ressemble aux espèces de Nouvelle-Calédonie à ceci près que les sépales sont en général longuement soudés entre eux.
Remerciements
Les auteurs tiennent à remercier chaleureusement les personnes suivantes: Heidi Schmidt (MO) et Mélanie Thiébaut (LY). Les auteurs remercient également leurs collègues de NOU et P; le MNHN et l'IRD pour donner accès à leurs collections via l'infrastructure de recherches RECOLNAT (ANR-11-INBS-0004), ainsi que Jacques Florence qui a accepté de corriger les diagnoses latines. Les réviseurs du manuscrit, Martin Callmander et Jérôme Munzinger en ont amélioré la pertinence et la structure, qu'ils en soient aussi très amicalement remerciés. Les auteurs remercient finalement chaleureusement l'association Endemia.nc, particulièrement Shankar Meyer et Aurélie Fourdrain, et les membres de l'association NC-RLA pour les évaluations du statut de conservation, ainsi que les entreprises minières Koniambo Nickel SAS et Prony Resources New Caledonia (anciennement Vale Nouvelle-Calédonie).
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